Les Mexicains peuvent compter sur un attaquant polyvalent en la personne de Rondón. Capable de conserver le ballon haut sur le terrain pour permettre à ses coéquipiers de venir prêter main forte en attaque, le joueur de 35 ans possède également la vitesse et le sens du timing nécessaires pour venir apporter le danger depuis les couloirs. De plus, le meilleur buteur du Venezuela (45 réalisations au compteur) a démontré à maintes reprises ses qualités de finisseur. Au cours de la Challenger Cup de la FIFA™ disputée au Stade 974 de Doha, Al Ahly a toutefois su contenir les assauts de Rondón et limiter ainsi les options offensives de Pachuca. Aron Winter, membre du Groupe d’étude technique, analyse ici le rôle joué par la charnière centrale égyptienne, qui a largement contribué à préserver un score nul et vierge durant 120 minutes en remportant la plupart de ses duels face à Rondón.
L’entente entre les centraux
Pachuca a souvent tenté de trouver Rondón (n°9) au moyen de longs ballons durant la Challenger Cup de la FIFA. Qu’il se soit agi d’un choix délibéré ou dicté par le placement très avancé adopté par Al Ahly lors des coups de pied de but et des phases de construction des Mexicains, ces solutions directes obligeaient les deux centraux d’Al Ahly, Ramy Rabia (n°5) et Yasser Ibrahim (n°6), à s’adapter constamment. Winter précise ici que la capacité du duo à collaborer et se répartir intelligemment les rôles a été essentielle.
« Leur capacité à museler l’attaquant est exceptionnelle, surtout quand on sait l’impact qu’a eu Rondón dans le match précédent, contre Botafogo. Face à Al Ahly, il dû se retrouver trois fois en position de marquer, pas plus. Le reste du temps, les défenseurs ont parfaitement su le neutraliser. Dans la vidéo ci-dessous, on voit que les Égyptiens obligent leurs adversaires à jouer long dès la remise en jeu, en les empêchant de construire de derrière. L’entente entre Rabia et Yasser est parfaite : Yasser se chargeait à chaque fois de marquer Rondón de près, tandis que Rabia assurait la couverture derrière son coéquipier. »
Les données recueillies par l’équipe Analyse des performances et tendances du football de la FIFA confirment que Rondón a disputé un nombre considérable de duels. Elles corroborent également l’analyse de Winter concernant la capacité des centraux d’Al Ahly à contenir le Vénézuelien. Ce dernier est le joueur ayant disputé le plus grand nombre de duels aériens au cours du match (10), mais il n’a réussi à conserver le ballon que trois fois. Le rôle des deux centraux – décrit par Winter et mis en évidence dans la vidéo 1 – se reflète quant à lui dans le nombre de « marquages préventifs », terme désignant le fait d’aller presser un adversaire qui n’est pas encore en possession du ballon. Chargé de contenir Rondón, Yasser totalise 34 marquages préventifs alors que Rabia n’en compte que sept, ce qui correspond à son rôle de joueur chargé d’assurer la couverture.
Soutien et organisation tactique
Quand un seul des deux centraux était en mesure de s’occuper de Rondón, d’autres joueurs d’Al Ahly venaient en renfort pour assurer la couverture, notamment en cas de longs ballons sur les côtés, loin de l’axe, qui empêchaient le second central d’intervenir.
« Dans la vidéo 2, Rondón reçoit un ballon sur un côté et Yasser va au duel. Le latéral droit, Omar Kamal, remarque que le second défenseur central est trop loin de l’endroit où aura lieu le duel. Il décide alors d’aller couvrir lui-même l’espace dans le dos. La situation est similaire dans la vidéo 3. Chaque fois que Kamal se trouve à proximité de l’endroit où Rondón est susceptible de recevoir le ballon, il va au soutien du central pour couvrir l’espace et générer une situation de 2 contre 1 en faveur de son équipe », explique Winter.
Organisation tactique
Malgré leurs prestations tout au long du match, les deux centraux d’Al Ahly n’ont pas toujours réussi à priver Rondón de ballons. Mais l’organisation tactique des Égyptiens leur a permis d’empêcher l’attaquant de se montrer dangereux même quand il était en possession du ballon. En effet, tous les joueurs se replaçaient afin de reformer le bloc en cas de longues passes en direction de Rondón, limitant ainsi les espaces à sa disposition. Si Rondón se voyait contraint d’aller vers son propre but pour conserver et échapper au pressing de Yasser, les milieux d’Al Ahly intervenaient à leur tour pour empêcher les Mexicains de développer leur jeu, comme nous le voyons dans la vidéo 4 avec le marquage effectué par le milieu axial Marwan Attia (n°13).
Rôle du dernier rideau défensif
En tant que dernier rideau défensif de l’équipe, la charnière centrale doit être capable de limiter les risques au maximum. « Les centraux ont obligé Rondón à évoluer dos au but », indique Winter. « Dès qu’il recevait le ballon, il y avait toujours Yasser ou Rabia au marquage pour l’empêcher de se retourner. » De manière plus générale, cela a permis à Al Ahly de fermer les espaces dans le dos de la défense aux joueurs de Pachuca. Mais il est arrivé que Rondón échappe au marquage de ses vis-à-vis.
« Dans l’extrait ci-dessous, l’attaquant parvient à recevoir le ballon face au but et à tenter sa chance, ce qui n’est pas arrivé souvent durant la rencontre. Comme on le voit, il se montre dangereux dès qu’il arrive à se retourner. Malgré tout, les deux centraux conservent la même organisation : l’un d’eux va au marquage et l’autre en couverture, ce qui lui permet de s'interposer sur la frappe », souligne Winter.
Malgré ses19 solutions proposées dans le dos de la défense d’Al Ahly, Rondón n’a reçu le ballon qu’à trois reprises. Ce faible taux de réception est à mettre au crédit de Yasser et Rabia. Ces derniers n’ont d‘ailleurs rien changé à leur organisation quand Rondón parvenait à contrôler : ils ont gardé leur sang-froid et affiché la détermination nécessaire pour annihiler le danger.
Points à retenir
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La charnière centrale doit être parfaitement coordonnée lorsqu’elle fait face à un attaquant rapide et puissant. Avoir un défenseur au marquage de l’attaquant et un second en couverture est un bon moyen d’annihiler le danger.
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Il arrive que l’attaquant soit servi dans des zones où un seul des deux centraux est en mesure d’intervenir. Dans ces cas-là, un autre joueur défensif doit se charger de couvrir l’espace derrière l’endroit où se déroule le duel.
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L’organisation défensive globale est elle aussi fondamentale pour contenir des attaquants dangereux. Si l’équipe est en mesure de reformer rapidement son bloc à la perte du ballon, elle pourra limiter les espaces à disposition des joueurs offensifs adverses.
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La meilleure façon de neutraliser un attaquant rapide et puissant est de l’empêcher de se retrouver face au but. Si l’attaquant arrive à se retourner, les centraux doivent rester échelonnés, avec un joueur au marquage et l’autre en couverture.
Coupe Intercontinentale de la FIFA : Real Madrid – Pachuca
Pachuca affrontera le Real Madrid mercredi en finale de la Coupe Intercontinentale de la FIFA. Deux membres du Groupe d’étude technique donnent leur avis sur cette affiche.
Aron Winter : Je pense que ça ne sera pas un match facile pour le Real Madrid, surtout vu les prestations de Pachuca jusqu’ici. Les Madrilènes devront être particulièrement efficaces à la récupération pour exploiter les phases de transition offensive en exploitant l’espace dans le dos de la défense mexicaine. Tout va se jouer dans le cœur du jeu. Comme on l’a vu contre Botafogo, les deux milieux de Pachuca, Elías Montiel et Pedro Pedraza, mettent beaucoup de rythme et sont intelligents tactiquement. Ça sera intéressant de voir comment ils s’en sortiront face à Luka Modrić et Jude Bellingham. Je suis également curieux de voir comment les centraux du Real s’y prendront pour répondre au défi physique imposé par Rondón.
Pascal Zuberbühler : J’ai hâte de voir comment le gardien de Pachuca, Carlos Moreno, va gérer les relances face au Real Madrid. Est-ce que Pachuca va continuer à opter pour du jeu direct sur Rondón, comme c’était le cas contre Al Ahly, ou tenter de construire de derrière ? Il faudra une grosse prestation de Moreno : vu la qualité des attaquants madrilènes, on peut s’attendre à voir de nombreuses frappes. Le gardien devra notamment bien évaluer quand il devra défendre son but et quand il lui faudra gérer l’espace. Concernant le Real Madrid, Thibaut Courtois fait partie des gardiens les plus complets au monde. Il a énormément progressé dans la distribution du jeu ces deux-trois dernières années et il a un excellent sens du placement qui lui permet de prendre les bonnes décisions dans les moments clés. Madrid peut aussi compter sur Andriy Lunin, qui est un très bon second gardien. Il pourra faire parler sa puissance et son explosivité en cas de titularisation .