Prise de décision et positionnement des gardiennes au moment de défendre l’espace

Trois options s’offrent aux gardiennes lorsque l’adversaire est en passe de percer le dernier rideau. Elle peut décider de quitter sa ligne de but pour défendre l’espace dans sa surface et hors de sa surface, rester sur sa ligne pour protéger son but ou se placer en soutien de la défenseure qui va disputer la possession du ballon à l’attaquante. La décision de la gardienne doit tenir compte de la position de la défenseure la plus proche de l’attaquante adverse.  

Bien sûr, la relation et la compréhension entre la gardienne et ses arrières jouent un rôle très important dans ces situations. Comme l’explique Nadine Angerer, cette entente se renforce au fil des entraînements.

« La gardienne doit lire la situation et savoir où se trouve la défenseure la plus proche pour évaluer correctement le danger. La joueuse en possession du ballon est-elle pressée ? La gardienne doit-elle reculer ou peut-elle avancer ? La gardienne doit constamment réévaluer et ajuster son placement en fonction de la situation. » 

« La communication entre défenseure et gardienne est capitale elle aussi. La gardienne doit parler pour signaler son intention, qu’elle décide de sortir pour s’emparer du ballon ou qu’elle choisisse de rester sur sa ligne. Dans un cas comme dans l’autre, elle doit le signaler verbalement. La gardienne et sa défenseure doivent savoir ce que l’autre va faire dans telle ou telle situation. Ça vient avec le temps, à force de s’entraîner et de jouer ensemble. La relation de confiance est fondamentale. Les défenseures et gardiennes doivent apprendre quels sont les points forts et les préférences de chacune dans ces différentes situations, et cela passe par le fait de s’entraîner et de disputer des matches ensemble. »  

Option 1 : Défendre l’espace

Si l’adversaire prend sa défenseure de vitesse et a de l’espace devant elle, la gardienne doit sortir pour réduire l’angle, aussi bien sur les côtés qu’en hauteur, et défendre l’espace dans lequel l’attaquante s’engouffre. Dans le même temps, toute défenseure en mesure de se replacer doit revenir en courant pour fournir une couverture supplémentaire, notamment en se plaçant derrière la gardienne, à proximité du but.

Option 2 : Rester sur sa ligne pour défendre le but

Si la défenseure est à la lutte avec la porteuse de balle mais que cette dernière a la possibilité de tirer, la gardienne doit rester basse et défendre le but. Elle doit avoir confiance en la capacité de sa défenseure à stopper l’attaque ou à empêcher l’adversaire de jouer. 

Option 3 : Se placer en soutien de la défenseure

Si la défenseure est à la lutte avec l’attaquante pour la possession du ballon et que cette dernière a peu de chances de pouvoir tirer, la gardienne peut faire office de défenseure supplémentaire pour offrir une solution si sa coéquipière parvient à récupérer le ballon. 

Les vidéos ci-dessous donnent trois exemples de gardiennes qui prennent la bonne décision pour protéger leur but, et sont accompagnées des explications de l’ancien gardien international suisse Pascal Zuberbühler.

Cata Coll (ESP) : défendre l’espace hors de la surface de réparation 

Dans notre première vidéo, la gardienne espagnole Cata Coll (n°23) décide de quitter sa ligne pour aller défendre l’espace hors de sa surface en réaction à une attaque suédoise potentiellement dangereuse. 

« Dans cette situation, la Suède effectue une remise en touche dans son propre camp alors que l’Espagne défend très haut », observe Zuberbühler.  « Catalina Coll, la gardienne espagnole, est aussi positionnée haut sur le terrain, à 25 mètres de sa défense, et elle reste en contact avec le reste de l’équipe.  

En mettant sur pause à la onzième seconde, on voit que l’Espagne est vulnérable au moment où le ballon arrive au centre du terrain. Coll comprend qu’une passe en profondeur ajustée dans le dos de la défense permettrait à l’attaquante suédoise de prendre la profondeur. On constate également que la joueuse en possession du ballon peut tenter sa chance, puisque Coll est loin de sa ligne. Mais c’est un risque que la gardienne est prête à courir pour protéger l’espace derrière sa défense. Une fois la passe en profondeur effectuée, l’attaquante suédoise coupe dans le dos de la dernière défenseure espagnole. Coll prend alors immédiatement la décision de sortir pour défendre cette zone. Il s’agit d’une décision courageuse qui lui permet de dégager le ballon. Elle n’aurait pas pu réussir cette intervention si elle avait évolué plus bas. Le fait d’être restée au contact du reste de l’équipe, qui jouait haut sur le terrain, s’est avéré crucial. »

Catalina Pérez (COL) : défendre l’espace dans sa surface de réparation 

Pascal Zuberbühler a choisi la deuxième vidéo en raison de la décision prise par Catalina Pérez, la gardienne de la Colombie (n 1), de quitter sa ligne pour défendre l’espace dans sa surface. 

« Sur cette vidéo, on voit que Pérez se place à la limite de sa surface lorsque le Maroc récupère le ballon dans son propre camp. En mettant sur pause à la neuvième seconde, on voit clairement que la défense de la Colombie est en danger en cas de ballon en profondeur. À ce moment, Pérez s’est déjà repliée dans sa surface, mais elle reste à 11 mètres de sa ligne, toujours connectée au reste de l’équipe. Dès le départ du ballon, adressé dans le dos de la défense, Pérez sait que l’attaquante adverse arrivera en premier sur le ballon. Elle intervient de façon autoritaire et explosive. Elle démarre rapidement et sprinte pour aller récupérer le ballon dans les pieds de l’attaquante. Cette excellente réponse face à une situation dangereuse est rendue possible par la position de départ de Pérez, par le fait qu’elle soit restée au contact du reste de l’équipe et par la rapidité de son intervention. »

Gaëlle Thalmann (SUI) : Au soutien d’une défenseure en 1 contre 1

Dans notre dernier exemple, Gaëlle Thalmann décide de se placer en soutien de sa défenseure engagée dans un duel.

« On voit tout de suite qu’elle est positionnée assez haut, à 13 mètres de son but, connectée au reste de l’équipe », note Pascal Zuberbühler. « L’attaquante à la lutte pour le ballon tente de déborder la défenseure, mais Thalmann remarque que cette dernière est bien placée et elle se positionne en conséquence pour lui offrir une solution de passe. Avant de recevoir le ballon, elle prend l’information en regardant le terrain pour savoir où elle pourra adresser sa passe. Une fois le ballon transmis, elle se déplace pour offrir à nouveau une solution à la défenseure en possession du ballon. Thalmann offre un bon exemple de lecture du jeu. Elle comprend qu’elle n’a pas besoin d’aller au-devant du ballon ici car elle lit très bien la situation et l’intervention de sa défenseure. Elle est parfaitement connectée au reste de l’équipe. » 

Lorsque la ligne défensive d’une équipe est sous pression ou que l’adversaire a réussi à percer le dernier rideau, la gardienne de but doit être attentive à la fois au placement de la défenseure la plus proche d’elle et au placement de cette joueuse par rapport à la porteuse du ballon. La position de la gardienne par rapport à sa ligne de but et à la défense joue aussi un rôle clé dans sa capacité à protéger l’espace. On ne saurait donc trop insister sur l’importance de la confiance, de la bonne entente et de la communication entre gardiennes et défenseures, une relation qui se travaille à l’entraînement et se renforce avec la répétition des matches.