Directeur sportif de la Fédération de Football des États-Unis (USSF), Earnie Stewart a vécu de très près l’évolution de la culture du football aux États-Unis au cours des 20 dernières années. Cet ancien international américain, qui a effectué la quasi-totalité de sa carrière aux Pays-Bas, explique ce que les matches disputés à domicile avec les Stars and Stripes pouvaient avoir de déconcertant.
En effet, il n’était pas rare d’entendre les supporteurs s’enthousiasmer à des moments inattendus, par exemple lorsqu’un joueur effectuait une tête. « Pour une personne ayant grandi en Europe et habituée à jouer en Europe, c’étaient des moments assez bizarres », affirme l’intéressé.
Mais cela a changé depuis. « Aujourd'hui, il y a une culture du football, ça respire le football. D’ailleurs, les matches de MLS et de NWSL se jouent à guichets fermés. C’est un aspect extrêmement important », précise l’homme aux 101 sélections et aux trois participations à la Coupe du Monde de la FIFA™. « Cela signifie que le football a connu un essor exceptionnel et que, désormais, les spectateurs sont aussi des connaisseurs. »
Les résultats de la sélection masculine ont également beaucoup progressé. Depuis 1990 et leur retour régulier en phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA™, les États-Unis se sont hissés trois fois en huitièmes de finale et une fois en quarts de finale de la compétition reine. Ils ont en outre atteint le dernier carré de la Copa América à deux reprises, en 1995 et 2016. L’an passé, les Stars and Stripes ont remporté la Gold Cup de la Concacaf pour la septième fois de leur histoire, ainsi que l’édition inaugurale de la Ligue des Nations de la Concacaf. Dernière performance en date, ils ont validé leur ticket pour la Coupe du Monde de la FIFA, Qatar 2022™ où ils affronteront l’Angleterre, la RI Iran et le pays de Galles dans le groupe B.
Rendre le football véritablement mondial est au cœur de la Vision 2020-2023 du Président de la FIFA Gianni Infantino. Et en tant que pays hôte de l’édition 2026 de la Coupe du Monde de la FIFA, les États-Unis ont une opportunité exceptionnelle de franchir un nouveau palier et d’aller plus loin dans la compétition. Chez les femmes, les États-Unis sont déjà une référence. Il s’agit en effet de la nation la plus titrée aussi bien en Coupe du Monde qu’aux Jeux Olympiques, avec quatre sacres dans chacun des deux événements. Et l'objectif est évidemment de rester au sommet.
Faire en sorte que chaque talent ait une chance est un aspect essentiel du programme des États-Unis. À cet égard, l’étude novatrice de la FIFA sur le développement mondial arrive à point nommé, d’autant qu’elle intègre un rapport dédié pour toutes les associations membres participantes.
« Nous sommes en train de mettre en place notre programme de développement technique. Donc qu’un tiers, et en l’occurrence la FIFA, vienne sur place afin d’analyser la situation était une véritable aubaine », se réjouit Earnie Stewart.
« Comment se présente le développement des talents dans notre pays et comment envisagions-nous les choses ? L’objectif était de s’appuyer à la fois sur nos observations et sur celles de la FIFA et, parallèlement, de nous inspirer de ce qui se fait de mieux à travers le monde. Nous voulons progresser un peu plus chaque jour. Nous avons de grandes ambitions pour notre pays. Les États-Unis sont très étendus, ce qui nous permet d’avoir le vivier et les structures nécessaires. »
Nous voulons progresser un peu plus chaque jour. Nous avons de grandes ambitions pour notre pays. Les États-Unis sont très étendus, ce qui nous permet d’avoir le vivier et les structures nécessaires.
Spécialiste haute performance, Ged Roddy a travaillé sur le rapport des États-Unis. Selon lui, l’USSF a parfaitement illustré, à travers son approche positive et ouverte, la façon dont les associations membres peuvent tirer parti du rapport.
« Les États-Unis se sont montrés extrêmement réceptifs dès le début du projet. Ils cherchaient, et ils cherchent toujours des axes d’amélioration, car ils veulent devenir les meilleurs », affirme Roddy. « Ils ont été très coopératifs. Nous avons pu échanger ouvertement, en toute franchise, qu'il s’agisse des aspects sur lesquels ils estiment avoir été bons ou des domaines dans lesquels ils pensent pouvoir progresser. »
« Ils ont tiré profit de la FIFA, dans le sens positif du terme. Et c’est exactement ça que nous voulions. Ils ont ainsi eu toute la latitude d’analyser ce qui est déjà mis en place et de prendre des décisions destinées à orienter leur travail à l’avenir. »
Stewart reconnaît que les États-Unis ont parfois du mal à éviter que certains joueurs de talent passent entre les mailles du filet. « Je pense que nous pouvons nous organiser de manière plus efficace pour éviter cela », a-t-il reconnu.
« D’après ce que j’ai pu voir et ce qu’a pu constater la FIFA, chacun utilise des pyramides différentes. Si nous parvenons à nous structurer et à nous organiser de façon optimale, cela arrivera moins. Mais actuellement, j'imagine que de nombreux talents nous échappent du fait de la présence d’entités et d’organisations distinctes qui possèdent chacune leur propre pyramide. »
Il était également important de définir un parcours clair allant du football de jeunes au monde professionnel, d’autant qu’aux États-Unis le football est en concurrence avec d’autres sports.
« Chaque enfant devrait avoir la possibilité d’évoluer à un niveau qui lui correspond, quel que soit le niveau en question. Par la suite, certains deviendront professionnels, d’autres arbitres, d’autres encore deviendront des amateurs de football », précise Stewart.
Concernant le football féminin, Stewart estime que le passage par le sport universitaire pourrait perdre en importance. « Par le passé, et c’est un aspect sur lequel nous nous penchons actuellement, le championnat universitaire était considéré comme ce qui se faisait de mieux aux États-Unis », précise-t-il.
« Chez les garçons, nous avons pu constater que passer par le sport universitaire n’est plus aussi déterminant. La MLS a créé ses propres académies, tout comme l’USL. Différentes d’académies ont vu le jour dans le football masculin, et nous pensons que ce modèle de formation va également se développer au niveau féminin. Nous suivons cela de près. »
À long terme, l’objectif est de compter parmi les sélections masculines régulièrement citées comme favorites au titre de champion du monde, tout en restant au sommet chez les femmes.
« Nous cherchons à construire des succès sur la durée », explique Stewart. « Nous souhaitons entrer dans la cour de nations comme l’Espagne et le Brésil, toujours présents en phase finale, et qui atteignent régulièrement les quarts de finale ou les demi-finales. C’est ça, notre objectif. C’est pour cela que nous nous rendons chaque jour au travail, et c’est vers ça que l’on tend. »