Afin de proposer un résumé global complet, cet article présente les données portant sur la défense, les passes et la finition pour chaque équipe et pour toutes les équipes, match par match et sur l’ensemble de la compétition. Les données utilisées sont les phases de jeu, la distribution du jeu et les types de buts. La combinaison de ces trois séries de données permet d’obtenir une vue d’ensemble pertinente des performances réalisées dans le cadre de la compétition, susceptible d’aider les entraîneurs, joueurs et amateurs de futsal à mieux appréhender la façon dont ce sport est pratiqué à l’heure actuelle. Vainqueur de la compétition, le Brésil est parfois utilisé à titre d’étude de cas pour illustrer les conclusions d’ordre stratégique et tactique qu’il est possible de tirer de ces données.
Sans ballon : phases de jeu
L’une des séries de données originales utilisées par la FIFA porte sur les phases de jeu et vise à découper le temps de jeu effectif d’une équipe en différentes catégories. On distingue au cours d’un match le temps passé avec le ballon, sans le ballon et les coups de pied arrêtés. La mesure des performances d’une équipe à travers ces paramètres apporte une référence permettant d’évaluer ses intentions tactiques. L’analyse de ces données permet de renforcer, et parfois de réinterpréter, les tendances constatées par la simple observation.
L’examen des périodes sans ballon d’une équipe apporte un éclairage sur son plan de jeu et son comportement défensifs : à quel endroit l’équipe se place-t-elle pour défendre (haut sur le terrain, au milieu, bas sur le terrain) ? À partir de là, exerce-t-elle un pressing ou se contente-t-elle de rester en place (pressing ou bloc) ?
Lorsqu’une équipe défend, la FIFA mesure neuf phases différentes en futsal : bloc haut, pressing haut, bloc médian, pressing médian, bloc bas, pressing bas, contre-pressing, transition défensive et repli. Pour en savoir plus sur ces différentes phases, cliquez ici. Vous trouverez ci-dessous des vidéos illustrant les trois phases de bloc :
L’analyse de ces phases de jeu a notamment pour intérêt de permettre d’agréger les données correspondantes de différentes manières. Il est par exemple possible de mesurer les performances d’une équipe lors d’un match en particulier ou pour l’ensemble de la compétition. Cela nous permet également d’évaluer les performances globales pour une compétition donnée, toutes équipes confondues. Il est donc possible de tirer des enseignements tactiques à partir d’un match en particulier ou de l’ensemble de la compétition, pour une équipe ou pour l’ensemble des participants, par exemple pour en tirer des conclusions sur l’évolution générale du futsal de haut niveau.
Les phases défensives lors de la Coupe du Monde de Futsal de la FIFA 2024
La figure 1 montre le temps de jeu effectif passé par l’ensemble des équipes dans les différentes phases défensives en Ouzbékistan. Bien qu’il soit nécessaire de nuancer cette consolidation des chiffres sur l’ensemble de la compétition, puisqu’elle reste superficielle sur certains aspects (nous aborderons la question plus loin), l’analyse de la répartition apporte d’une manière générale certaines informations intéressantes sur le déroulement tactique des matches de futsal et permet de comparer les différentes phases de jeu. Un chiffre saute aux yeux : le cumul de la part des blocs bas et médians (30,18% + 20,56%) représente la moitié du temps de jeu effectif sans ballon des équipes. Sur l’ensemble de la compétition, ces deux phases de bloc contrastent fortement avec le très faible temps de jeu sans ballon consacré par les équipes à évoluer en bloc haut (2,87% du temps).
Comme nous l’avons mentionné plus haut, il convient de nuancer ces tendances constatées sur l’ensemble de la compétition. Les équipes en présence adoptent des styles et plans de jeu différents, sans compter tous les facteurs externes susceptibles d’influer sur les performances défensives de chacune d’elles. Les équipes peuvent aussi changer d’approche d’un match à l’autre. La figure 2 présente toute la gamme de performances pour chaque phase défensive, ce qui révèle l’éventail des approches adoptées par les équipes lorsqu’elles n’avaient pas le ballon en Ouzbékistan. Ainsi, des formations ont passé 73,5% de leur temps de jeu sans ballon en bloc bas sur certains matches, là où d’autres n’ont consacré que 4% du temps passé sans ballon à cette configuration. Pour souligner cette variété de jeu, voici quelques chiffres décomposant les différentes phases défensives chez les vainqueurs des deux matches ci-dessous, avec des pourcentages de temps passé en bloc bas radicalement opposés :
POR 1-2 KAZ – Huitième de finale
Bloc bas : 72,60%
Pressing bas : 0%
Bloc médian : 2,80%
Pressing médian : 0%
Bloc haut : 0%
Pressing haut : 0%
Contre-pressing : 0,55%
Repli : 0,16%
Transition : 1,30%
Coups de pied arrêtés défensifs : 9,50%
ANG 2-7 UKR – Phase de groupes
Bloc bas : 16,80%
Pressing bas : 0%
Bloc médian : 30,20%
Pressing médian : 0%
Bloc haut : 4,00%
Pressing haut : 0,36%
Contre-pressing : 1,30%
Repli : 1,90%
Transition : 0,88%
Coups de pied arrêtés défensifs : 7,70%
Lors de la Coupe du Monde de Futsal de la FIFA, 2024, la FIFA a pu, pour la première fois, appliquer à ses données des paramètres identiques à ceux d’une précédente édition. C’est ce qui permet de constater des évolutions tactiques ou, au contraire, des éléments récurrents dans le jeu défensif pratiqué par les équipes entre la Coupe du Monde de Futsal de la FIFA, Lituanie 2021™ et l’édition 2024 (figure 3). Par exemple, l’un des constats établis par le Groupe d’étude technique porte sur l’augmentation du temps de jeu défensif passé en bloc bas. L’intégration dans l’analyse de données portant sur les autres phases défensives permet de mettre en évidence la réduction du temps consacré aux blocs hauts, qui est sans aucun doute liée à la tendance constatée pour les blocs bas.
Les phases défensives du Brésil, vainqueur de la compétition
La figure 4 permet de comparer les pourcentages du Brésil, vainqueur de l’épreuve, à ceux de l’ensemble des autres équipes. Les Sud-Américains ont passé 42,79% de leur temps de jeu sans ballon en bloc bas, soit 12 points de pourcentage de plus que la moyenne des équipes.
Par ailleurs, la comparaison entre les phases défensives du Brésil en 2021 et 2024 confirme l’accent mis par Marquinhos Xavier sur la solidité défensive en Ouzbékistan. Le pourcentage de blocs bas de la Seleção a ainsi presque doublé en 2024 (42,79%) par rapport à 2021 (24,15%). Cette augmentation considérable correspond au plan de jeu de Xavier, qui a expliqué dans un entretien avec le Centre de ressources techniques de la FIFA qu’il souhaitait que son équipe se concentre sur la défense de son propre espace (zone 1), l’efficacité défensive jouant un rôle capital dans la capacité à aller loin dans une compétition.
La figure 6 montre que le Brésil se place au sixième rang des équipes ayant passé le plus de temps en bloc bas (sur 24 équipes participantes). En ne concédant que six buts en sept matches, les sextuples vainqueurs de la compétition ont ainsi affiché une stabilité défensive qui n’est pas passée inaperçue aux yeux des observateurs, parmi lesquels le Groupe d’étude technique de la FIFA. Cette qualité défensive est d’autant plus remarquable que les Brésiliens se sont historiquement bien plus illustrés par leurs prouesses offensives.
Avec ballon : distribution du jeu
La distribution du jeu fait partie des autres données collectées par la FIFA au cours des matches de futsal. Le terme désigne les différents types de passes effectuées par une équipe au cours d’un match. Comme pour les phases de jeu, l’analyse de la distribution offre un aperçu du profil tactique et des tendances d’une équipe en termes de passes. Cette section aborde trois types de distribution du jeu en particulier : les ballons vers le pivot, les ballons vers l’attaque et les longs ballons. Vous trouverez ci-dessous des vidéos illustrant ces différentes catégories et leur utilisation tactique :
Distribution du jeu lors de la Coupe du Monde de Futsal de la FIFA 2024
D’après la figure 7, qui montre la moyenne par match des trois catégories de distribution de jeu lors de la Coupe du Monde de Futsal de la FIFA 2024, les longs ballons constituent le type de passe le plus fréquent avec 24,5 unités par match en moyenne pour l’ensemble des équipes. Suivent les ballons vers le pivot et ceux vers l’attaque (10,5 et 6,3 par match respectivement). Cet état des lieux de la distribution du jeu n’a pas fondamentalement évolué par rapport à 2021 (figure 8). La seule différence notable est une baisse du nombre de ballons vers l’attaque qui s’explique par l’augmentation du nombre de phases offensives lancées par des joueurs qui franchissent la ligne médiane balle au pied plutôt que par des passes vers l’attaque. Cette phase de jeu, désignée par la FIFA sous le nom de « franchissement de la ligne médiane », a bondi de 20,6 points de pourcentage en l’espace d’une édition.
La distribution du jeu du Brésil
Tout comme les phases défensives, la distribution du jeu lors de la compétition révèle des tendances générales, mais ne permet pas d’identifier les nuances particulières pour chaque équipe, ni la variabilité tactique d’un même participant d’un match à l’autre. Pour illustrer ce principe, la figure 9 mesure les moyennes du Brésil lors de sa campagne victorieuse par rapport à celles de l’ensemble des équipes. La Seleção a ainsi envoyé trois fois plus de ballons au pivot par match que la moyenne de la compétition et quatre ballons longs de moins par match que la moyenne de la compétition (20,27 contre 24,50).
La comparaison avec les mêmes données lors de l’édition 2021 montre que les Brésiliens ont davantage cherché le pivot en 2024, avec trois fois plus de ballons vers ce joueur par tranche de 20 minutes par rapport à 2021. D’autres évolutions sont visibles en ce qui concerne les autres types de passes, mais de moindre ampleur, avec une augmentation du nombre de longs ballons et une diminution du nombre de ballons vers l’attaque, conformément à la tendance générale de la compétition.
Si l’on se penche uniquement sur le jeu avec les pivots sur l’ensemble d’Ouzbékistan 2024, l'on remarque que la Seleção s’est fortement appuyée sur ce joueur pour déployer ses attaques, puisque 7,86% des passes du Brésil étaient adressées aux pivots. Comme le montre la figure 11, il s’agit du deuxième total le plus élevé de la compétition, loin devant la majorité des équipes en lice. Les pivots ont également été à la réception de 34,9% des passes brésiliennes en phase offensive et ont inscrit 53,9% des buts de leur équipe en Ouzbékistan. Ces chiffres illustrent le style de jeu particulier des Sud-Américains par rapport aux autres équipes, et reflète la conviction de Marquinhos Xavier selon laquelle le pivot fait partie intégrante de l’identité de jeu du Brésil.
Mais comme toujours dans le domaine des statistiques, il convient de tenir compte du contexte. Si le Brésil arrive deuxième, derrière la Nouvelle-Zélande, pour ce qui est du taux global de passes au pivot, il reste également deuxième pour les passes au pivot en phase offensive alors que les Néo-Zélandais chutent à la huitième place dans cette seconde catégorie. Cela semble indiquer que les transmissions du Brésil vers leur pivot étaient généralement précédées d’une série de passes réalisées en vue de construire leur attaque, alors que la Nouvelle-Zélande optait pour des passes plus directes vers le pivot.
Types de buts marqués
L’analyse des phases de jeu avec ballon permet de décomposer le temps de jeu effectif d'une équipe lorsque celle-ci a la possession. Par définition, lorsqu’une équipe marque, c’est qu’elle était en possession du ballon. Il est donc possible d’associer à chaque but inscrit une phase de jeu avec ballon, de façon à mettre en évidence l’origine ces buts pour chaque équipe, pour l’ensemble des équipes, match par match et pour l’ensemble de la compétition.
Buts marqués lors de la Coupe du Monde de Futsal de la FIFA 2024
La figure 12 indique la répartition des différents types de buts inscrits en Ouzbékistan. Ceux marqués en phase offensive représentent 30,9% du total. Les buts sur contre-attaque constituent le deuxième contingent de buts marqués avec 16,6% du total. De façon surprenante, 10,5% des buts ont été inscrits face à une équipe évoluant en power play.
Deux tendances principales se dégagent si l'on compare les éditions 2021 et 2024 (figure 13). D’abord, comme l’a mis en évidence le Groupe d’étude technique, la part des buts inscrits en phase offensive a augmenté de 10,3 points de pourcentage et s’explique par la hausse du temps passé en bloc bas dans les phases défensives en Ouzbékistan. Ensuite, l’édition 2024 a vu une augmentation de la part des buts marqués sur contre-attaque, et ce en dépit d’une réduction générale du temps passé en phase de contre-attaque. Cela indique une efficacité offensive améliorée sur ces phases de jeu. Vous trouverez ci-dessous quelques exemples de ces deux types de buts.
La répartition des types de buts marqués par équipe permet là encore de visualiser l’écart entre les différents participants sur l’ensemble de la compétition. La figure 14 présente toutes les équipes qui ont inscrit plus de 3,5 buts par match en 2024.
Répartition des buts du Brésil
Il ressort de la figure 15 que la différence la plus flagrante entre 2021 et 2024 en ce qui concerne les buts marqués par les Brésiliens porte sur le total général. Durant l’édition 2024, ils ont inscrit 40 buts en sept matches, soit 12 de plus qu’en 2021, année où les Sud-Américains avaient terminé troisièmes et donc disputé également sept rencontres. En ce qui concerne les différentes catégories, on peut noter l’augmentation du nombre de buts marqués sur contre-attaque en Ouzbékistan (15% contre 7,14% en 2021). Ils ont représenté 15% des buts du Brésil en 2024, contre 7,14% en 2021. Cet écart est conforme à la tendance constatée à l’échelle de la compétition entre les deux éditions. Il paraît également lié au temps accru passé par le Brésil en bloc bas, une configuration propice aux contre-attaques.
Toutefois, deux équipes qui marquent beaucoup de buts peuvent procéder de manières très différentes pour y parvenir. La figure 16 compare les buts marqués par le Brésil avec ceux inscrits par l’Ukraine, troisième en 2024. Contrairement aux futurs vainqueurs, l’Ukraine présente une faible part de buts inscrits sur phase offensive (15% contre 37,5% pour le Brésil) et une plus grande proportion de buts marqués sur interception, sur contre-attaque et pendant des power plays de l’adversaire. Le fait de parvenir à marquer des buts dans ces situations indique de la part des Ukrainiens une approche patiente en phase défensive, associée à des attaques rapides en transition. L’équipe a souvent déployé un contre-pressing agressif en vue de profiter des erreurs de l’adversaire. Ce style de jeu explique également la large proportion des buts marqués dans ces situations.